19 mai 2011

Cuniculophobophagie

3 commentaires
On m'a demandé d'écrire des textes personnels sur des douleurs atroces, des peurs terrorifiantes de la mort et tout ça.
En voici donc deux d'une extrême violence morale qui racontent le dur parcours du cuniculophobe (rhalala! j't'y choppe à avoir l'esprit tordu, toi! va voir dans l'dico) éternellement affamé que je suis.
Le bassesse au ras des pâquerettes est bien entendu au rendez-vous :)

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Il est là, je le sens. Ses oreilles pointues, ses yeux profonds comme la mort. On raconte les pires légendes au sujet de ces monstres, ces démons venus du fin fond des enfers. Ils mangeraient les cœurs encore chauds des victimes qu’ils viennent de découper avec leurs dents disproportionnées.

Je regarde à droite, à gauche. Je cours.

Déjà quatre heures qu’il me poursuit dans cette horrible forêt. Je n’en peux plus. Une goutte de sueur perle le long de ma tempe.

Il est là, je l’entends. Le craquement des brindilles sous le velours de ses pattes, le silence de son cri, son souffle.

Je regarde à gauche, à droite. Toujours rien.

Mais il se rapproche. Il se rapproche aussi vite que je me rapproche de la mort.

Il parcourt les derniers mètres le séparant de moi. Elles s’écoulent, les dernières secondes de mes derniers instants.

Je le vois, ne verrai plus jamais rien.

Il est là. Le lapin !


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J’étais terrassé, laminé. C’était tout un monde qui s’effondrait sous moi. Tous mes rêves qui s’envolaient.


Je ne vais pas juger la vie ni en faire le plaidoyer. La liste serait trop longue et les charges trop lourdes pour ce qu’elle m’a fait.

Cependant, alors que devant moi le tragique m’attire à la défaillance ; je me demande ce que j’ai commis, ce que j’ai loupé, pourquoi cela m’arrive-t-il. Pourquoi ?

J’invoque mes souvenirs mais ceux-ci semblent déjà m’avoir quitté. Je me sens soudain seul. Une solitude douloureuse.

Des tremblements commencent à agiter mon corps comme pour me rappeler la détresse qui à empoigné mon cœur. Mon cœur… ce n’est pas lui qui me sauvera à présent que ses battements sourds se font muets.

Et tandis que dans mon esprit tous les maux du monde se heurtent en une cohorte infinie, devant mes yeux il n’y a que le vide. Un vide qui fait surgir en moi une douleur insatiable.

Un grondement.

Je me sens défaillir.

Plus de place pour la colère ni la peur ; ce ne sont plus mon cerveau ni mon cœur qui dictent désormais mon être.

Le silence se fait autours de moi. Mes yeux s’emplissent de buée. Je ne ressens plus les tremblements qui ont doublé d’intensité.

Si jamais je m’en sors, je me promets de ne plus jamais laisser échapper le contenu de ce qui maintenant est aussi vide que mon âme. Âme qui écoute impuissante le cri incoercible de mes entrailles.

Je défaille.

Je referme la porte devant moi. Cette porte qui aurait dû être lourde de tant de choses. Et m’éloigne tête baissée, estomac vide, du frigo.