Elle était là, dans la rue et au
milieu des gens qui passaient, arrivée de nulle part.
J’étais
là, je ne sais pas où, et je la regardais, et je l’écoutais.
La
contrebassiste ne venait de nulle part. J’en jurerais, elle n’appartenait pas à
la réalité. Elle semblait si impossible, là, le piquet de son gigantesque
instrument planté dans la boue qui liait son monde à celui-ci. Elle était si
impossible. Elle était si… vraie.
À
ce moment j’étais bien incapable de dire qui j’étais et à quoi ressemblait la
vie autour. Il n’y avait plus que cet instant et je le jure, il était infini.
Le monde s’est arrêté à ces notes, tellement profondes que mon âme vibrait.
J’étais
fasciné par ses paupières fermées qui ne se souciait de rien. Avait-elle
conscience de ce qu’il y avait autours ?
Elle
était si libre.
Une
larme a brûlé mon visage. J’avais envie de rire mais je n’osais qu’à peine
respirer. Mes mains étaient moites et mes doigts tremblaient.
Chaque
corde qu’elle tirait était comme mille coups dans mes entrailles. Elle laissait
glisser sa tête sur chaque nuance et les notes s’emmêlaient à ses cheveux.
Ses
notes qui devenaient si puissantes qu’elles étaient des vagues qui me
reversaient et me relevaient. Qu’à chacune d’elles j’ai cru mourir puis revenir
à cet instant hors de la vie.
Je
n’avais de toute mon existence rien vu d’aussi beau et je le sais, ne verrai
plus rien de tel.
Que
ce moment ne s’arrête jamais !
Je
n’avais pas compris le mot béatitude. Aujourd'hui, je le tremblais.
Nos
vies à cet instant, avaient plus de sens que jamais plus elles n’en auraient.
Puis
elle est partit.
J’ai
voulu la suivre. De tout mon être j’ai voulu lui parler. Mais je n’ai pas osé.
Je
suis resté là. Assis dans la boue. À fixer l’endroit par lequel elle s’était en
aller et qui était maintenant vide.
Je
n’ai pas osé…